Livre du jour : Henri Alleg : La question

Livre du jour Henri Alleg La question

La langue originale: Français

Titre original: Une question

Traduction: Beatriz Morales Basto

Année de parution: 1958

Évaluation: D’accord

En 1954, moins de dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, éclate la guerre d’Algérie, motivée par un mouvement de guérilla réclamant l’indépendance de la métropole française. Colonisé depuis plus d’un siècle, ce pays africain avait des statuts différents, nombre de ses autochtones s’étaient battus pour libérer la France du nazisme, et le mouvement indépendantiste était alimenté par des traitements discriminatoires, l’expropriation des ressources naturelles et la prise de conscience qu’un grand nombre de pays ont donné des ailes aux processus de décolonisation des années 50 et 60.

Henri Alleg, rédacteur en chef du journal Républicain algérien, Il était également membre du Parti communiste algérien et un fervent défenseur du droit à l’autodétermination. Il a été arrêté par les parachutistes du général Massu, envoyés pour réprimer la rébellion et torturé pendant des mois pour obtenir des informations sur les rebelles et leurs complices. Le livre est le récit d’Alleg sur son internement et une condamnation de la torture systématique utilisée pendant le conflit.

Alleg n’épargne aucun détail sur les différentes techniques auxquelles il a été soumis. Il décrit froidement et précisément les procédures appliquées : coups, décharges électriques, isolement cellulaire, noyade, violences psychologiques, administration de drogue. Je dois honnêtement dire que, peut-être parce que nous avons beaucoup vu et lu depuis, ces méthodes, aussi brutales soient-elles, ne sont presque jamais particulièrement horribles par rapport à la sauvagerie pratiquée dans de nombreux autres endroits et situations.

Mais la véritable valeur de ce livre réside dans l’effet qu’il a eu sur l’opinion publique française. Écrit alors qu’il était encore en prison, d’où il est sorti en coopération avec ses avocats, sa publication en 1958 a ouvert les yeux de la société sur les atrocités commises par les militaires sur le sol algérien, comme cela s’est produit peu après la guerre du Vietnam, et a eu un impact. que la France a finalement décidé de mettre fin au conflit en quittant la colonie.

Du point de vue du lecteur, le livre a un ton quelque peu étrange. Comme je l’ai déjà mentionné, c’est une histoire assez objective, pleine de vrais noms, qui laisse à peine échapper des émotions. Alleg devait être un homme froid, déterminé à ne pas abandonner dès la première minute et en effet, le processus se termine sans qu’il chante. Il y a quelque chose dans ses paroles sur la fierté de résister, quelque chose qui perturbe quelque peu le point de vue de notre protagoniste et change d’une manière ou d’une autre la prédisposition naturelle à participer à sa souffrance. Alleg semble si complet, si irréductible à sa position, qu’il est facile de passer de l’admiration pour sa force au doute de la cruauté du supplice. Mais il me semblerait cynique de remettre en question ce qu’il a dit, et peut-être que tout cela n’est rien d’autre que l’autosatisfaction très humaine de quelqu’un qui a vécu une expérience aussi extrême. Quoi qu’il en soit, cette intégralité rend le personnage quelque peu difficile à comprendre d’un point de vue émotionnel.

Alleg est définitivement un combattant aux jambes noires, ce qui est très clair dans l’interview un peu longue qui conclut l’édition que j’ai lue. En plus de mettre en lumière la pratique systématique de la torture par les militaires français en Algérie, il examine de manière critique la position des gouvernements successifs, dont le général de Gaulle, à qui l’on attribue (à tort, selon Alleg) le fait d’avoir su reconnaître la nécessité de mettre fin à la torture. époque coloniale. Et non sans un certain ton pamphlétaire, l’auteur expose sa position sur le colonialisme, contre lequel il a contribué à lutter.

Comme je l’ai dit plus tôt, la valeur du livre est avant tout historique, non pas tant en raison de la torture qu’en raison de son influence publique, facteur important parmi les déterminants de la fin de la période de domination. Des situations similaires de colonialisme ont proliféré à travers le monde pendant de nombreuses décennies, et il est très probable que différentes puissances d’occupation aient mis en œuvre des pratiques similaires de torture, de répression et de discrimination. C’est donc un témoignage, un exemple parmi tant d’autres qui nous a fait réfléchir à l’époque et devrait encore aujourd’hui nous aider à remettre en question certains comportements.

Oliver Langelier

Une peu plus sur moi, passionné par les nouvelles tek et l'actualité. Je tâcherai de retranscrire toutes mes découvertes. Oliver Langelier